Le goéland mélancolique

Le goéland mélancolique

jeudi 25 juillet 2019

Le meunier découragé

Avançons et faisons paraître ma production attachée au19 juillet. Pour changer un peu, voici une petite fable. Serge a provoqué la chose en proposant deux autres fins et une morale à ma nouvelle « Demande à la lune ».
Et en plus, j’ai trouvé que sa fin à lui était bien plus séduisante et mélancolique que la mienne.
Ça a du bon d’avoir des copains brillants...
Avant de vous faire lire la fable, je vous soumets la « Serge-alternative »:

La jeune fille pâle referma doucement son livre, se leva, lui sourit, glissa son bouquin dans son sac, et d’une démarche qui parut dans l’instant aérienne à Joseph, elle se dirigea vers la sortie. Le train s’étant arrêté pour la nième fois, à Meudon Bellevue, nota Joseph. Arrivée à la porte du wagon, elle se retourna vers Joseph : « Alors, vous venez ? ».

Joseph sut, au plus profond de son être, que l’opportunité de demander quoique ce soit à la lune ne se représenterait plus jamais à lui. Il se précipita. Quelques instants plus tard, en sortant de la gare avec l’inconnue, il décida à compter de ce jour de ne plus avoir aucun désir extraordinaire, renonça à ses fantasmes lunaires car son crédit était épuisé, constata avec le temps qu’il ne s’en portait pas plus mal, se contentant tout au plus, et cela sans la moindre amertume, de penser que pendant toutes ces années, la lune attendait son heure…     

Ou

La jeune fille pâle referma doucement son livre, se , lui sourit, glissa son bouquin dans son sac, et d’une démarche qui parut dans l’instant aérienne à Joseph, elle se dirigea vers la sortie. Le train s’étant arrêté pour la nième fois, à Meudon Bellevue, nota Joseph. Arrivée à la porte du wagon, elle se retourna vers Joseph : « Alors, vous venez ? ».

Joseph sut, au plus profond de son être, que l’opportunité de demander quoique ce soit à la lune ne se représenterait plus jamais à lui. Il paniqua. Quelques instants plus tard, la porte du train se refermait et lui était toujours scotché à son siège. Il décida à compter de ce jour de ne plus avoir aucun désir extraordinaire, renonça à ses fantasmes lunaires, constata avec le temps qu’il ne s’en portait pas plus mal, se contentant tout au plus, et cela sans la moindre amertume, de penser que depuis toujours, la lune se moquait de lui…

Et donc... 

La morale de cette histoire, c’est qu’on ne récolte que ce qu’on l’on sème, et encore pas toujours. 
 

Voilà !!!

A moi maintenant, avec une fable dont le titre est « Le meunier découragé » et dont la morale est finalement assez proche de celle de Serge: Autant en emporte le vent, en priant pour que ce soit du bon côté.

Autant en emporte le vent
Peut s’entendre différemment.
Le Sage de se dire :
Il faut se satisfaire de ce qui nous fait tort
Quand l’adepte du pire
Exprime sa colère contre le mauvais sort !
Pour illustrer cela, une histoire me vient.
Un meunier, d’entreprise, avait accumulé.
A plus de mille louis il estimait son bien,
Ne se souciant plus guère de compter en deniers.
Mais Femme lui manquait pour faire son bonheur.
J’irai donc à la ville pour trouver âme sœur,
Si chance me sourit, se dit notre meunier.
Il croise une donzelle, lui fait un brin de cour,
Lui propose épousailles avant la fin du jour.
Trois mois après promesse, le voilà marié.
Les mois heureux s’écoulent, il en remercie Dieu :
Mon bonheur est immense et je vous en sait gré.
Avoir femme et fortune avant que d’être vieux
N’est pas chose courante. Soyez cent fois loué !
L’année suivante hélas, aux moissons, fut muette.
Le meunier se désole, qui n’a plus grain à moudre.
Pour sauver son ménage, il contracte des dettes.
Les créanciers sur lui tombent comme la foudre.
Abattu, le pauvre homme fait venir son aimée :
Ma fortune n’est plus, je suis las, fatigué
Je n’ai plus à t’offrir qu’une vie misérable.
Laisse moi, je t’en prie, face à ce sort funeste.
Comment ? dit la meunière, quelle est donc cette fable ?
Tous tes écus partis, tu veux que rien ne reste ?
Tu voudrais que ta femme, à son tour, s’envole ?
J’ai choisi mon époux, je n’ai qu’une parole ;
Nous ne perdrons pas tout puisque l’amour est là.
Ton esprit assombri faisait le mauvais choix.
Le sort nous est contraire ? Montrons lui notre foi
En un bel avenir et prions pour cela.
Dans cette adversité, prions, mon cher amant
En acceptant qu’autant en emporte le vent.
En choisissant sciemment la plus gaie des deux faces
Cette femme était sage.
Ecartez les rancœurs, vous aussi faites place
Au meilleur de l’adage.

1 commentaire:

  1. Des deux variantes, toutes deux originales, je garderais la première, allez savoir pourquoi !..
    Le conte m’a beaucoup plu, et le choix de rimer s’accorde bien à l’argument. Très joliment tourné. La morale de l’histoire me fait penser à l’injonction de Marc Aurèle*: "Ce qui dépend de toi, c’est d’accepter ou non ce qui ne dépend pas de toi", autrement dit ce qui dépend de toi fais-le, ce qui ne dépend pas de toi accepte-le**
    Merci Alain de nous offrir du bonheur à lire, bonheur qui va pouvoir se poursuivre grâce à ta plume fertile et vagabonde.
    ————
    * Rapporté par un auteur qui, lui, a lu Marc Aurèle.
    **C’est l’avis de Frédéric Lenoir

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