Le goéland mélancolique

Le goéland mélancolique

mercredi 4 septembre 2024

L'oiseau

Une nouvelle pour Marceau, avec tout mon amour pour ce petit bonhomme qui deviendra grand...


Comme un aigle...

 

Il vole !!! Dans un grand éclat de rire, il est monté vers le ciel. Le ciel du salon. Son Grand-père le tient à bout de bras par la taille et l’encourage :

- Agite tes ailes, Marceau ! Tu es un aigle et tu vas bientôt toucher le plafond ! Ouiiiii ! Tu le touches ; continue ; bats l’air avec tes bras. Et maintenant, un virage et on pique vers le sol ! Wahouou ! Tu es un aigle ! Marceau vole et... repart vers le ciel. 

- Touche le ciel, Marceau, vas-y, touche le ciel !!!

Marceau éclate d’un rire qui semble inextinguible. Un de ces rires d’enfant, irrésistibles, contagieux. Ses bras font de grands cercles dans l’air de la pièce. Marceau a « chopé » le coup !  Mais déjà le ciel s’éloigne et il replonge à nouveau. Il sent le vide qui l’attire vers le sol où son Grand-père le redépose enfin. Marceau a deux ans à peine. Marceau est un aigle qui vient d’apprendre à voler. Et ça lui plait !!!

 

 

Comme un ange...

 

La fête du vent bat son plein. Un immense et majestueux bouquet de cerfs-volants remplit le ciel. Répartis sur toute la surface de la grande prairie de bord de mer qui les accueille aujourd’hui, les pilotes de ces semblants d’aéronefs de tissus légers ou de papier aux couleurs vives sont tous des enfants, même si certains ressemblent à des adultes. Leurs rires, leurs regards brillants et leurs cris de joie en démentent l’âge. Oui, vraiment, seulement des enfants, aujourd’hui, à la fête du vent !

Marceau est l’un d’eux. Il est arrivé déguisé, comme l’organisateur de cette joyeuse manifestation l’a proposé aux participants. Sa Grand-mère, sa « Mimi », lui a confectionné des ailes en carton plume qu’elle a sanglées par-dessus son sweat bleu marine :

- Comme ça, ce sera plus facile à mettre ou à retirer, si tu as trop chaud ! Mimi pense à tout...

En arrivant sur l’étendue d’herbe rase griffée par un petit vent bienveillant, particulièrement propice aux figures acrobatiques des cerfs-volants les mieux dirigés, Marceau a couru pour que son losange de toile légère, décorée d’un splendide phénix bleu sur fond jaune citron, prenne son envol. Il a senti alors le vent prendre dans ses ailes blanches. Sensation indescriptible, merveilleuse. Il a cru un instant qu’à son tour, il allait décoller. Sourire radieux. Félicité enfantine. 

Sans plus se préoccuper de son cerf-volant qui d’ailleurs n’a besoin de personne pour flotter haut dans les petits airs qui peignent la prairie, Marceau court pour, peut-être, réussir à rejoindre le phénix bleu. Marceau a cinq ans révolus. Marceau ressemble à un ange. Et il rêve de pouvoir un jour voler.

 

 

Comme un oiseau...

 

L’instructeur arrive à sa hauteur. Comme pour les autres novices, par ailleurs tous parachutistes émérites, il vient vérifier qu’aucune faute n’a été commise ; fixation ferme des sangles du harnais de parachute, ajustement parfait sur le corps de la combinaison de vol en textile lycra et nylon de haute technologie, présence du déclencheur, jugulaire du casque bien serrée, lunettes en place...

- OK, c’est bon, Marceau ! Après Phil, ce sera à toi. N’oublie pas de pousser le plus fort possible sur tes jambes juste avant le grand plongeon. Le secret d’un bon Base jump, c’est sûrement ça, mon pote, s’écarter un peu de la paroi verticale grâce à une bonne poussée...

Le Base jump, c’est la version ultime des sauts en wingsuit. Les hommes-oiseaux s’envolent depuis un point très élevé, ici le fameux « spot » vénézuélien nommé Les chutes de l’ange, avec un vide vertigineux qui vous happe en un dixième de seconde.

Le grand frisson ; adrénaline garantie pour un risque maximal. 

Une petite course est possible sur le terrain en pente, juste avant le grand saut. Marceau s’élance donc et arrivé au bord, il pousse, du plus fort qu’il peut. La cascade verticale, de plus de 900 mètres de hauteur lui promet ce creux au ventre qu’il a tant souhaité éprouver. Mais c’est autre chose de plus fort encore qui se produit. Marceau, à l’instant même où il bascule dans la chute, ressent comme deux mains qui le saisissent à la taille, puis une drôle de résistance à l’air, là, dans son dos. 

 

Des bras qui le soutiennent, des ailes qui le portent... 

 

Marceau a vingt ans. Par la grâce de ses souvenirs de môme, Marceau est redevenu un aigle, un ange ; il est oiseau...

 

 Il vole !!! 

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